[JM B] Informatique et société N° 22 - 16 mars 2010

Sommaire

  1. Petits et gros soucis
  2. Liens, citations et réactions de vous tous
  3. Bienvenue


1 Petits et gros soucis

Le fichier Stic

Le fichier Stic (fichier des infractions constatées) est tenu par la police, et fort mal tenu. Il contient des fiches concernant plusieurs millions de personnes. La Commission nationale de l'informatique et des libertés, après enquête, a constaté que sont exactes seulement 17% des fiches qui y figurent concernant les mis en cause. (83% d'erreurs !)

De plus, les accès à ce fichier sont réservés à des policiers agissant dans le cadre d'une enquête précise. Or il arrive (fréquemment ?) que des policiers consultent Stic pour leurs besoins personnels, ou pour revendre les renseignements à des entreprises de détectives privés ou de renseignement économique, ou les communiquer à des tiers. Il y quelques temps, un très haut responsable de la police parisienne avait ainsi été accusé d'accès illégaux.

Dès janvier 2009, la CNIL demandait au gouvernement de réformer le fonctionnement de Stic. Il semble que cela n'ait guère eu d'effet;

Tout récemment, un candidat (de gauche) aux élections régionales est traité par ses adversaires (de droite) de « délinquant multirécidiviste chevronné ». Enquête faite , on constate que certaines des accusations concernent un homonyme, que d'autres devraient avoir été légalement effacées, que d'autres sont douteuses. De plus, le journal Le canard enchainé découvre que le casier judiciaire de l'intéressé est vierge.

Devant ce fatras d'accusations hétéroclites, l'hypothèse la plus vraisemblable est que tout cela a été relevé dans Stic. Cela confirme, d'une part, que ce fichier est très mal tenu, puisqu'on y trouve tout et n'importe quoi. D'autre part, on a constaté après-coup que plus de quarante policiers ont accédé illégalement à la fiche Stic de l'intéressé. Sans doute est-ce l'un de ces policiers qui a communiqué illégalement les renseignements aux hommes politiques de droite. La liste des policiers ayant consulté le fichier peut être connue sans aucune difficulté. On se demande dans ce cas pourquoi aucun d'entre eux ne fait l'objet, officiellement, d'une enquête et d'une condamnation pour accès illégal. Et pourquoi l'homme politique qui a utilisé ces renseignements n'est pas poursuivi pour usage illégal.

Il est normal que la police tienne des fichiers. Encore faudrait-il qu'ils soient bien tenus, et que les accès soient contrôlés.

On dit généralement « Je ne crains pas d'être fiché, je n'ai rien à me reprocher ». Mais que penser d'un fichage tel que Stic où 83% des fiches sont fausses ?

Rappelons que le fait d'être dans Stic peut interdire l'accès à certains emplois (sécurité, gardiennage, etc.). Voici maintenant que cela peut être utilisé si l'on devient gênant pour le pouvoir en place !

Sur demande de toute personne, la CNIL peut contrôler le contenu du fichier Stic la concernant et faire enlever les renseignements erronés.
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Le téléphone, un ami qui vous veut du bien

Votre téléphone portable peut être utilisé pour espionner à distance vos conversations téléphoniques, vos textos et même les conversations qui se tiennent autour de vous.

Cette information avait déjà été donnée il y a plus d'un an, mais elle a été ravivée par la place que lui a consacrée récemment un journal grand public, Le Parisien.

Résumé : vous achetez, pour un prix modique, un logiciel de piratage. Vous vous arrangez pour disposer pendant une heure ou deux du téléphone portable de la personne que vous souhaitez espionner, vous y installez le logiciel. Vous pouvez ensuite suivre ses conversations téléphoniques, ses textos, et les conversations qui se tiennent autour d'elle.

On estime que, compte tenu de la baisse des prix des logiciels, cette pratique va se répandre. Idéal non seulement pour les problèmes de couple, mais aussi pour ses relations professionnelles, ses amis et ennemis politiques, ses concurrents, ses enfants, que sais-je encore.

Dès maintenant, dans certaines réunions, on demande aux participants d'enlever les piles de leur portable et de poser l'appareil sur la table.

Quelques bizarreries :

En France, l'usage de ces logiciels est interdit mais leur vente est libre.

Les employeurs ont, semble-t-il, le droit d'espionner leurs employés sur les téléphones portables de l'entreprise, à condition de les prévenir.

Les parents ont, semble-t-il, le droit d'espionner leurs enfants mineurs.

Les mêmes société qui vendent les logiciels espions vendent aussi des logiciels pour se protéger des logiciels espions. On suppose qu'elles sont en train d'élaborer des logiciels qui permettent de neutraliser les logiciels anti logiciels espions. Business as usual.

Pendant la guerre, pour conseiller aux gens de se méfier de l'ennemi, on disait « Chut, les murs ont des oreilles ». Maintenant, les oreilles sont partout, y compris les oreilles des gens que l'on croit ses amis.
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2 Liens, citations et réactions de vous tous

Puces RFID, devrons-nous choisir entre progrès et liberté ?

sur le site de JC Vitran, responsable du groupe "Libertés et TIC" de la ligue des droits de l'homme.

http://resistancesetchangements.blogspot.com

Extraits :

« Ce sont des étiquettes intelligentes qui, sans faire de bruit, sont en train d'envahir notre quotidien et qui permettront de communiquer à distance avec les objets, voire aux objets de communiquer entre eux. C’est, indéniablement, une avancée technologique mais aussi un incroyable outil de traçage qui inquiète les organisations de protection des libertés individuelles.

[...]Dans le domaine du contrôle social, les applications multiples liées à la miniaturisation nanométrique – des RFID de la taille de la poussière, par exemple – couplées à des bases de données informatiques de plus en plus performantes, peuvent faire redouter une société de surveillance totale où les moindres faits et gestes d’un individu seraient épiés et enregistrés à son insu. À défaut d’un encadrement contraignant et de garanties effectives de limitation de leur emploi et de contrôle de leur utilisation, les RFID nanotechnologies permettraient, par leur hyper miniaturisation et par leur invisibilité, une surveillance indétectable des citoyens : mini-caméras de vidéosurveillance, microdrones, etc...

[…] La situation est d’autant plus préoccupante que ces nouvelles technologies représentent, on l’a vu, des enjeux économiques considérables, sur des marchés qui ne sont encore qu’en émergence, et l’on peut s'inquiéter des pressions industrielles et financières importantes qui couplées à des envies de domination du pouvoir déboucheraient sur une société de surveillance généralisée.

Il est difficile de réduire à des extraits un article aussi dense et comportant autant d'exemples concrets. Reportez-vous au site
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Vidéosurveillance : des garanties insuffisantes de protection de la vie privée conduisent le Conseil Constitutionnel à censurer la transmission d'images d'immeubles d'habitation.

Sur le site de la Commission Nationale de l'Informatique et des Libertés
http://www.cnil.fr

Le Conseil a considéré que la vidéosurveillance dans les halls d'immeubles était une atteinte à la vie privée. Une fois de plus le Conseil se comporte en repaire de contestataires irresponsables. Heureusement, trois sympathisants du président de la République viennent d'y être nommés. Il y en avait assez de ces beaux esprits droits de l'hommistes.


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L'inquiétant séminaire de l'Arcep sur la neutralité du réseau

Signalé par l'un de vous, merci. Cela dit, j'ai reçu l'information sans source. Dommage, merci de me communiquer les liens vers les infos que vous me donnez.

La très officielle Arcep (autorité de régulation des communications électroniques et des postes) organise un « colloque de haut rang » sur la neutralité du réseau. J'essaie de résumer en trois lignes un sujet d'une grande complexité :

Dans l'esprit de ses initiateurs, le réseau internet est « neutre » et transporte les contenus sans discrimination ni distinction. Il appartient ensuite aux autorités de chaque pays de déterminer quels contenus sont non conformes aux lois du pays, et de déterminer des méthodes pour en réprimer l'accès.

Sous des dehors techniques et consensuels, le colloque pourrait définir un « compromis pour une quasi neutralité du réseau », qui mettrait en partie le réseau sous la coupe du secteur marchand, en favorisant le transport des contenus les plus rentables.

De plus, le texte préparatoire indique que « la finalité essentielle des communications électroniques est l'accès des consommateurs aux contenus au travers des réseaux. », ce qui donne une priorité à la consommation de contenus par rapport à la création et à l'échange. C'est déjà ce qui était en germe avec l'asymétrie de l'ADSL, où le débit descendant est plus grand que le débit montant. Cela pourrait être accentué par de nouvelles mesures techniques ou tarifaires.

Rappelons aussi que les décrets d'application de la loi destinée à réprimer le piratage sur internet (Hadopi) viennent d'être publiés. Sous des aspects un peu complexes, le système revient en fait à confier aux industriels lésé par le piratage et à une société privée le soin de signaler les contrevenants aux autorités. Milice privée, dites-vous ? Pas tout à fait, puisque le conseil constitutionnel a exigé l'intervention d'un juge pour prononcer les sanctions. Les industriels prévoient qu'ils auront à signaler 25 000 à 50 000 infractions par jour. Combien faudra-t-il de juges, s'ils se mettent à vouloir contrôler effectivement les fichiers qui leur sont envoyés ?

Mise à jour du 18 mars 2010

Source :

La source de l'article contenu dans la lettre informatique et société N° 22 sur la quasi neutralité du réseau est le site "Réfléchir le numérique Numerama" et le lien est



http://www.numerama.com/magazine/15177-l-inquietant-colloque-de-l-arcep-sur-la-quasi-neutralite-du-reseau.html



Un extrait du site :
Déjà le choix technique de l'ADSL relevait d'un choix idéologique. L'Asymmetric Digital Subscriber Line déséquilibre par définition le rapport entre l'upload et le download, au bénéfice de ce dernier. L'issue du débat sur la neutralité du net pourrait radicaliser cette vision, en bridant les communications qui n'arrangent pas les plans commerciaux des fournisseurs d'accès à Internet, et en particulier leurs partenariats avec certains fournisseurs de contenus.
Cette vision énoncée par l'ARCEP confirme en tout cas les craintes que nous avions lorsque Jean-Luc Silicani en a été nommé président. "Une nomination qui pourrait être lourde de conséquences pour le filtrage des contenus", avions-nous écrit en rappelant qu'il était auparavant le président du Conseil Supérieur de la Propriété littéraire et artistique (CSPLA), qui a milité pour le filtrage des réseaux P2P.
"Si sa personne n’est pas en cause, cette nomination introduit un mélange des genres, qui ne contribuera pas à l’apaisement. Là où l’intérêt général devrait prédominer, nous craignons que des intérêts corporatistes et financiers l’emportent", s'était d'ailleurs inquiété le député socialiste Patrick Bloche.

Merci à ceux qui m'ont fait des reproches. Sourcer les infos est l'une des compétences de base du B2i...

La plupart des articles qui paraissent en ce moment sur la neutralité du réseau portent sur les modalités d'application de la loi Hadopi. Le texte de numerama pose un problème plus général et plus grave encore.

Fin de la mise à jour


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3 Bienvenue


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Fin de "[JM B] informatique et société" N° 22