[JM B] Informatique et société N° 23 - 13 septembre 2010

Sommaire

  1. Au fil des jours
    • L'eau monte, et nous ne le voyons pas
    • Dès six ans, surveillons grâce à Barbie
    • Le recensement biométrique inquiète la société civile indienne
    • Les biens virtuels, une machine à sous bien réels
  2. Liens, citations et réactions de vous tous
  3. Bienvenue


1 Au fil des jours,

L'eau monte, et nous ne le voyons pas

Le nombre de fichiers nominatifs créés par l'État sans associer le parlement, et souvent sans consulter la CNIL ou sans tenir compte de ses avis, les problèmes concernant la protection des données personnelles, en particulier sur les réseaux sociaux, le développement massif d'outils techniques de pistage, de surveillance croissent quotidiennement, inexorablement. Dans un contexte de montée organisée de la xénophobie et de crise sociale ces questions passent désormais presque inaperçues. Il y a plus important.

Le président de la Commission nationale de l'informatique et des libertés a coutume de comparer notre situation à celle d'une grenouille : si on la plonge dans l'eau chaude, elle réagit. Mais si on la plonge dans l'eau froide et que l'on fait monter progressivement la température, elle attend avec confiance. J'ai des doutes sur la réalité de l'expérience citée par A. Türk, mais n'en ai hélas aucun sur la montée à la fois insidieuse et inexorable d'une société de fichage préventif, de pseudo-transparence (« Je n'ai rien à cacher»), de surveillance de tous par l'État et de chacun par chacun.

Dès six ans, surveillons grâce à Barbie




Le fabricant de poupées Matell a annoncé en février 2010 la mise en vente d'une poupée Barbie avec caméra incorporée. On pourra ainsi filmer ce qui se passe autour de la poupée. Un logiciel facilement utilisable dès six ans permettra de monter les images et de les stocker sur son ordinateur. Je suppose que cela permettra aussi de les mettre en ligne sur internet

La presse et les radios, en France, ne rapportent cette information que maintenant, en septembre 2010. Je ne sais pourquoi ce délai. Sans doute parce que la commercialisation intervient en ce moment.

Extrait d'un site publicitaire : « Non, non, vous ne rêvez pas !!! Cette Barbie est équipée d’une véritable caméra numérique ! Ainsi, les petites filles pourront jouer les réalisatrices en filmant ses jouets ou ses copines !!! C’est LE gadget de la rentrée. » Passons sur la grammaire, ce n'est pas le but de Barbie...

Il faut se scandaliser du sexisme de cette publicité. Tout pour les petites filles, rien n'est prévu pour les garçons ! (Camion de pompier avec caméra dans le gyrophare ?)

On doit en tout cas se réjouir de ce vrai progrès, qui met la vidéo surveillance à la portée de tous dès le plus jeune âge. Les enfants pourront espionner leurs camarades lors des après-midi de jeu ou les réunions d'anniversaire. Les parents pourront espionner leurs enfants. Et tout un chacun pourra mettre tout cela tranquillement en ligne. Il était temps que l'on fasse clairement prendre conscience aux petits que si l'on n'a rien à se reprocher on n'a rien à cacher. L'âge de six ans est celui nécessaire pour utiliser seul le logiciel, mais l'on pourra bien sûr se servir de la poupée pour filmer, à leur insu ou non, des enfants beaucoup plus petits. On pourra aussi faire cadeau de la poupée à des parents un peu âgés et désorientés, pour mieux veiller sur eux.

Je trouve notre gouvernement un peu laxiste. Pourquoi ne pas introduire le principe du « Si je n'ai rien à me reprocher je n'ai rien à cacher » dans les cours d'instruction civique dès la crèche ?

Le recensement biométrique inquiète la société civile indienne

Extraits d'un article de Rue89 le 13 septembre 2010

http://www.rue89.com/2010/09/11/le-recensement-biometrique-inquiete-la-societe-civile-indienne-166148

« La récolte de données biométriques à l'occasion du recensement de la population indienne est censée favoriser l'accès des plus pauvres à des papiers d'identité et à de multiples services. Mais les risques d'instrumentalisation de données privées ne sont pas écartés.''

Depuis avril dernier, l'Inde a entamé le recensement décennal de sa population, estimée à environ 1,2 milliard de citoyens. Avec une nouveauté : les fonctionnaires vont recueillir pour la première fois les données biométriques de chaque habitant (relevé des empreintes digitales et photographie de l'iris en plus d'un questionnaire précis), afin de constituer le nouveau Registre national indien.

Chacun se verra attribué un numéro d'identité unique (UID), valable à vie. Jusqu'à présent, l'Inde ne délivrait pas de carte d'identité à ses citoyens.

[…](Le système se donne en particulier comme objectif de mieux répartir les aides sociales entre les pauvres et de prévenir la fraude et la corruption JM B)

Pour J.T. D'Souza, expert en informatique, l'utilisation de la biométrie à si grande échelle n'a jamais été tentée auparavant. Elle pose de nombreuses questions de sécurité liées à l'utilisation et au stockage de ces fichiers.

Par exemple, des pirates informatiques pourraient voler les bases de données et transmettre ces informations à des structures commerciales, des agences de renseignement, et même à des organisations criminelles.

[…]

Reste que les risques de profilage religieux par certains des 28 gouvernements des États qui composent l'Inde, ou de détournement des données par les lobbies des castes les plus puissantes, sont bien réels.

Un risque d'instrumentalisation d'autant plus grave si on le place dans le contexte du Réseau national de renseignement (Natgrid) : le ministre de l'Intérieur, P. Chidambaram, a annoncé vouloir utiliser ces données pour prévenir une attaque terroriste majeure.

Selon lui, une fois NATGRID opérationnel, il sera facile d'avoir « un accès rapide, transparent et sécurisé à l'information recherchée par les agences de renseignement, afin d'identifier les cas qui doivent être surveillés et neutralisés ».

Fin des extraits de Rue89

Les biens virtuels, une machine à sous bien réels

Extraits du site Eco89 le 13 septembre 2010

http://eco.rue89.com/2010/09/12/les-biens-virtuels-une-machine-a-sous-bien-reels-166273

« La semaine dernière, j'ai offert un bulldog à un ami, une rose à ma copine, une bouteille de champagne à mon frère. Coût total : trois dollars. Le deal du siècle ? En fait, tout est faux : ils ont été achetés sur Facebook à un dollar pièce.

Ces cadeaux sont l'aspect le plus connu de la très juteuse industrie des « biens virtuels » qui prospère dans le monde entier malgré la crise. Dans World of Warcraft, un jeu de conquête « médiéval-fantastique », ils prennent la forme de glaives, d'armures et de baguettes magiques vendus ou échangés chaque jour sur le site du jeu ou sur des marchés secondaires.

Dans le monde virtuel de Second Life, ce sont des bâtiments, véhicules, vêtements, bijoux et autres œuvres d'art achetés parfois à prix d'or moyennant des Linden dollars échangés contre des devises bien réelles.''

Enfin, sur les réseaux sociaux, ce sont des boîtes de conserve qui permettent d'alimenter un animal de compagnie fictif, des bêches pour cultiver un lopin de terre virtuel et même de faux bouquets pour conquérir l'âme sœur.

Ces alignements de « 0 » dans le monde digital sont synonymes de beaucoup de « 0 » dans le monde réel. Si l'on en croit le rapport « Inside virtual goods », qui examine ce nouvel eldorado, le marché américain des biens virtuels aurait généré un peu plus d'un milliard de dollars (785 millions d'euros) aux Etats-Unis en 2009. Les projections pour 2010 évoquent des revenus encore plus élevés. [...]

La croissance de cette économie virtuelle, avec son offre, sa demande et ses propres devises dans certains cas, n'est pas sans risques. Parmi les fraudes possibles : le blanchiment d'argent, à travers l'achat et la vente d'immobilier virtuel par exemple.

Ken Rijock, consultant auprès de World-Check, une société spécialisée dans la lutte contre la criminalité financière, s'inquiète :

« Nos systèmes de justice traditionnels, faute de moyens et de compétences et à cause de la nature transnationale des crimes virtuels, ne peuvent faire face à ces défis. La justice ne fait que commencer à s'intéresser aux crimes virtuels, mais elle est constamment dépassée par les évolutions du Web. »

En 2006, une utilisatrice de Second Life est devenue millionnaire en investissant dans l'immobilier virtuel du jeu. Les agences de contrôle en manque de deniers savent ce qu'il leur reste à faire pour trouver des sous bien réels… »

Fin des extraits de Eco89

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2 Liens, citations et réactions de vous tous

Loppsi 2

La loi de programmation et de performance de la sécurité intérieure N° 2 est en cours de débat au parlement. Chaque jour, des amendements de plus en plus liberticides et préoccupants y sont ajoutés. Et encore, pour l'instant le débat a lieu au sénat, réputé plus modéré. Craignons ce qui va sortir de l'assemblée nationale...

Un exemple d'article paru sur ces débats

http://www.rue89.com/2010/09/08/securite-la-loppsi-kiffe-grave-les-nouvelles-technologies-165770

Videosurveillance

Site de la ligue des droits de l'homme Toulon

http://www.ldh-toulon.net/spip.php?article4035

Le nouveau compteur électrique de EDF

http://eco.rue89.com/2010/08/08/attention-votre-nouveau-compteur-electrique-peut-vous-espionner-161318

Commission nationale de l'informatique et des libertés

http://www.cnil.fr/

Je ne sais pas, mais avec tout ce qui se passe je trouve le site de la CNIL bien « profil bas ».

Iris

http://www.iris.sgdg.org/

Le fichage des roms, le fichier biométrique des étrangers « bénéficiaires » de l'aide au retour (Oscar), le passeport biométrique... Là, c'est plutôt profil haut vigilance constante et actions efficaces.

Ajout le 15 9 2010 : en parlant de vigilance et d'efficacité des actions, je parle de l'action de IRIS, pas de celle des fichiers visés.

Homo numericus

http://www.homo-numericus.net/

Un article du 11 septembre 2010 « Figures de la citoyenneté numérique ».

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3 Bienvenue


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